NEGOCIATIONS COMMERCIALES : VERS LA FIN D’UN SYSTEME ?

A peine la date butoir du 1er Mars 2017 est-elle derrière nous que la presse se fait déjà l’écho d’une campagne 2017 de négociations entre fournisseurs et distributeurs encore plus dure que précédemment, et qui, dans certains cas, ne serait même pas achevée. A peine la date butoir du 1er Mars 2017 est-elle derrière nous que la presse se fait déjà l’écho d’une campagne 2017 de négociations entre fournisseurs et distributeurs encore plus dure que précédemment, et qui, dans certains cas, ne serait même pas achevée.

En cause, des demandes antagonistes des différents acteurs de ces négociations, les uns souhaitant voir prise en compte une hausse parfois très forte du coût des matières premières, les autres arguant de la nécessaire défense du pouvoir d’achat des consommateurs, dans un contexte toujours morose.

N’est-il pas paradoxal que de telles difficultés surgissent presque en même temps que l’entrée en vigueur de la loi Sapin II dont l’objectif était, notamment, de renforcer la transparence dans la vie économique ?

Rappelons que cette loi est entrée en vigueur le 11 décembre 2016, ce qui signifie qu’elle était applicable à la campagne de négociations commerciales de 2017.

Pour ce qui concerne spécifiquement le contenu des conditions générales de vente, la loi Sapin II a renforcé l’article L441-6 du Code de Commerce en prévoyant que « les conditions générales de vente relatives à des produits alimentaires comportant un ou plusieurs produits agricoles non transformés devant faire l’objet d’un contrat écrit en application de l’article L631-24 du Code Rural et de la Pèche Maritime indiquent le prix prévisionnel moyen proposé par le vendeur au producteur de ces mêmes produits agricoles »

Par un effet de chevauchement, il était impossible que ces dispositions nouvelles aient le moindre impact sur le déroulement des négociations 2017, puisqu’elles sont entrées en vigueur postérieurement à la date butoir imposée aux fournisseurs pour communiquer leurs CGV à leurs partenaires économiques en vue de l’ouverture des négociations !

Peut-on néanmoins espérer qu’il en aille différemment dans les prochaines années, sur ce fondement ou sur un autre ? Rien n’est moins sûr, et ce, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord parce que les produits agricoles qui sont susceptible de faire l’objet d’un contrat conforme aux dispositions de l’article L631-24 du Code Rural et de la Pèche Maritime ne sont pas très nombreux. A notre connaissance, seuls les fruits et légumes frais et le lait de vache sont assujettis à ces dispositions, ce qui est évidemment bien peu pour avoir un impact réel et mesurable sur le déroulement d’ensemble des négociations.

Mais il y a plus, car d’autres instruments juridiques auxquels on pourrait songer ne paraissent pas d’avantage à même de favoriser une mutualisation des coûts, voire un partage des profits.

On observera tout d’abord que quand bien même des CGV indiqueraient le prix moyen d’achat des matières premières du vendeur, la loi ne dit pas ce qu’il faut en faire.

La prohibition de la revente à perte (Article L442-2 du Code de Commerce), à laquelle on pourrait songer, ne parait pas de nature à résoudre ce problème. Il faut se souvenir, en effet de ce que cette règlementation n’a pas pour objet de protéger un vendeur, mais de protéger un marché. Il s’agit d’éviter qu’un opérateur, surtout s’il est en position dominante, phagocyte un marché par des prix de prédation qui lui permettront d’évincer ses concurrents. Pour cette raison, la prohibition vise le vendeur et lui seul.

Par ailleurs, ces dispositions ne visent que la revente en l’état alors que le problème posé par une hausse du coût des matières premières vise bien entendu aussi, et certainement même au premier chef, la transformation.

Il semble également difficile de voir dans un prix en définitive trop bas pour couvrir des coûts de production un abus de négociation sous l’angle du déséquilibre significatif, du moins tant que le fournisseur n’a pas l’obligation d’indiquer en toute transparence quels sont ses coûts de production.

Pour pouvoir caractériser un abus, il faut forcément que les éléments qui serviraient de critère à l’abus fassent partie du champ contractuel !

Mais un tel encadrement législatif ôterait toute faculté de négociation au fournisseur, puisque toutes les composantes de ses prix de vente seraient connues de l’acheteur. Or, chacun sait que toute négociation comporte nécessairement une certaine part de bluff.

En définitive, l’idée sous-jacente de la loi Sapin II semble nous guider vers des conventions tripartites incluant le producteur. Il pourrait s’agir de la prochaine étape, car la Loi Sapin II prévoit un rapport à ce sujet dans le délai d’un an, soit d’ici le 11 décembre 2017.

Écrit par : Super User